Paradoxe, un modèle d'entreprise d'économie sociale
Article Nov. 30, 2022

Paradoxe, un modèle d'entreprise d'économie sociale

En ce dernier jour du mois de l’économie sociale, nous aimerions vous parler de l’un de nos partenaires, le Groupe Paradoxe. Le Groupe Paradoxe est une entreprise d’économie sociale favorisant l’insertion dans le domaine du spectacle et de l’évènementiel. Ils accueillent chaque année 30 participants que l’équipe de Paradoxe forme et va placer au mieux, auprès des entreprises du secteur.
Marc-André est chargé de la production pour le Groupe. Il n’est en poste que depuis sept mois mais ancien fournisseur, il connait depuis longtemps la structure et ses missions. Avec ses 20 ans d’expérience dans l’industrie et son regard bienveillant, il revient sur son travail chez Paradoxe.

Comment as-tu connu Paradoxe? Comment en as-tu entendu parler?

Paradoxe était un de mes clients puisque je fais aussi de l’éclairage architectural. Paradoxe m’a été référé par un copain qui cherchait à rehausser l’église parce qu’il y a aussi le côté théâtre de Paradoxe, l’église sur le boulevard Monk. Et j’ai rencontré le directeur général Gérald St-Georges. J’ai commencé à fournir des produits d’éclairage architectural et des produits pour leur théâtre et de fil en aiguille, il y avait un poste de vacant et on me l’a offert en me disant viens t’amuser avec nous.

Et cela faisait longtemps que tu les connaissais, que tu étais leur fournisseur?

Paradoxe, cela fait 25 ans que cela existe et moi, je pense que cela fait 7-8 ans que je les connais. Il y a quelques années quand j’ai déménagé, je me suis retrouvé avec un énorme inventaire d’équipement. Je les ai appelés et je leur ai dit : « Regarde, j’ai toute sorte de stock flambant neuf. J’ai besoin d’espace. Je vous le donne, venez le chercher. » Donc ils sont venus avec le camion et ils ont rempli le camion, bien plein (rire). Ce sont des outils d’enseignement maintenant pour le volet apprentissage et enseignement, ce qui est vraiment le fun.

Qu’est-ce que tu aimes dans ton travail chez Paradoxe?

Ce sont surtout les rencontres avec les clients, et aussi de savoir qu’on est en train de transmettre notre savoir, […] et puis c’est venir en aide à nos participants qui veulent vraiment travailler dans cette industrie là puisqu’ils doivent s’inscrire pour faire partie du groupe Paradoxe par l’entremise d’Emploi-Québec. C’est vraiment intéressant ce côté-là, de voir comment les gens arrivent la première semaine et qu’ils sont un peu perdus, un peu confus et puis, à la fin de leur apprentissage, ils savent exactement où est-ce qu’ils s’en vont. Il y a des gens qui développent des habilités absolument incroyables par l’entremise de ces sessions de formation au cours de leur 22-23 semaines.

Quelles sont les formations dispensées?

Il y a 2 cohortes par année. On a deux ensemble de formation. La première est plutôt manœuvre et tout ce qui est installation de scène, rideaux, ponts d’éclairage, structure, tout ce qui est le côté disons manuel, montage. Et puis, on a l’autre volet qui est le volet vidéo dans lequel les participants vont apprendre le montage vidéo, opérations de caméra, tournage de vidéos clips. Comme là, on est en train de travailler sur un nouveau projet pour les ainés donc on va tourner bientôt quelques capsules vidéo pour eux qui vont être diffuser dans les RPA.

Combien le Groupe Paradoxe compte de participants et de salariés?

Nous avons actuellement en vidéo, 8 participants et en manœuvre, 10. Nous avons un maximum de 18 personnes mais certaines personnes décident de faire autre chose dans les premières semaines et donc, nous gardons quelques contacts pour remplir nos cohortes.

Pour Groupe Paradoxe, nous sommes 2 formateurs, 1 assistant formateur, 2 travailleuses sociales, un directeur général et moi-même. Côté Théâtre, il y a 8 ou 9 membres de personnel et on a beaucoup de gens qui vont rentrer comme pigiste.

Peux-tu m’expliquer la distinction entre le Groupe Paradoxe et le Théâtre Paradoxe?

C’est comme s’il y avait deux sociétés avec le même nom de famille. Groupe et Théâtre travaillent ensemble pour le partage des locaux, partage des ressources humaines, partage des connaissances mais Groupe travaille principalement sur tout ce qui est projets externes donc quand on va chez vous [NDA : au Technopôle Angus pour le compte de la Société de développement Angus], ce n’est que du personnel de Groupe qui se déplace avec les participants tandis que Théâtre opère uniquement le lieu physique [NDA : Église sur le boulevard Monk] et fait aussi de l’apprentissage sur place. C’est comme notre école.

Il y a des participants qui vont sur tous les projets…

Sur tout. L’idée pour Groupe, c’est d’offrir la possibilité pour les participants de sortir du Théâtre pour pouvoir valider leurs connaissances et de voir autre chose que la routine du Théâtre qui fait toutes sortes d’évènements, bien sûr, mais c’est vraiment de les sortir de leurs zones de confort. Comme aujourd’hui, on est en train de faire un montage pour un festival de court-métrages, Longue vue sur le court et puis, ils sont en train de faire de l’accrochage, des rideaux, monter un écran, un projecteur, travailler avec un ensemble de sonorisation en 5.1. Cela fait trois semaines qu’ils sont en place. Cela fait beaucoup de nouveautés pour eux.

Comment se passe le processus de recrutement à la fin des cohortes?

On a un taux de placement hyper élevé, de plus de 90%. Les employeurs ont connaissance de cette main-d’œuvre car il n’y a que deux ou trois [organismes] qui font de l’enseignement en technique de scène, dans la grande région métropolitaine et puis, compte-tenu que chez nous, ils ont l’expérience de faire de l’externe avec Groupe et du conventionnel, de l’interne, plus corpo, plus spectacle avec le Théâtre, cela fait en sorte que les employés potentiels ont un bagage assez solide, des connaissances générales de base. Pour cette raison-là, les sociétés nous appellent et nous demandent quand notre cohorte se termine pout rencontrer les participants. Pour cette étape-là de leur cheminement chez nous, les participants et les travailleuses sociales vont travailler ensemble pour leur monter un CV, apprendre à se présenter et elles vont aussi guider les participants parce qu’admettons, on sait très bien que dans telle société, telle personne a plus la personnalité pour aller dans une structure plutôt qu’une autre. On fait affaire parfois avec des participants qui sont un peu fragiles, ont des problèmes d’anxiété donc on essaye de les placer là où ils vont pouvoir grandir et se stabiliser. Ça c’est vraiment important. Ça, je l’ai appris au cours des derniers mois.

Donc vous les placez, vous vous assurez que les participants soient au mieux dans leurs nouvelles fonctions. Parce qu’on pourrait se dire que le participant pourrait choisir là où il souhaite travailler mais vous le guidez, …

Le choix est toujours le sien. Il y en a qui vont choisir d’être uniquement pigistes, qu’ils veulent travailler sur appel, qu’ils veulent avoir la flexibilité des horaires, chose qui est très bien. Puis, il y en d’autres qui cherchent plus une stabilité. Il y a des employeurs qui travaillent plus dans le rock n’roll ou le touring ou un domaine où c’est très rushant, très stressant. Cela prend une personnalité particulière pour rentrer là, fait qu'on leur dit : « C’est peut-être une bonne idée mais tu n’es pas prêt encore. Pense à ces personnes-là parce qu’eux, ils vont t’aider à continuer ton cheminement, ton apprentissage. Ils offrent la formation continue, les horaires sont plus stables comme c’est du corpo... ». C’est de même qu’on essaye de les guider tout en leur remontant leur estime de soi aussi car c’est aussi cela l’idée. Ils ne pensent pas qu’ils sont capables de le faire alors qu’ils ont tout en main pour pouvoir le faire.

Quelles sont les entreprises employeurs ?

FMAV et Expertise font affaire avec nous. Solotech aussi. Cette année, exceptionnellement, Groupe Paradoxe a engagé deux finissants de la dernière cohorte par leur travail exemplaire, leur volonté d’apprendre et leur minutie.

Cela vous arrive souvent d’engager des finissants?

On va toujours préconiser le rappel de nos finissants en premier lieu […] On va essayer autant que possible de ramener notre monde aussi car cela nous fait plaisir de voir à quel point ils ont évolué et grandi.

Ils retournent dans la famille…

Oui, ils reviennent dans la famille. J’étais à Expo-Scène pour notre industrie, qui se tient au Palais des Congrès au printemps, et j’ai rencontré quelqu’un qui est un ancien finissant de Groupe Paradoxe d’il y a 12 ou 13 ans et cette personne m’a expliqué à quel point le Groupe Paradoxe a changé sa vie. Il est arrivé avec des problèmes de toxicomanie, il faisait de la dépression puis Gérald et son équipe ont carrément débâti cette personne et rebâti, en lui donnant les outils nécessaires. Puis aujourd’hui, il est dans le domaine depuis ce temps-là, il n’a jamais quitté et c’est un technicien hors-pair dans une très bonne société. C’est le fun d’entendre les témoignages.

Pour finir, as-tu une expérience marquante à me raconter?

(rires) J’en ai plein. Mais surtout, ce qui est surprenant dans cette industrie, c’est à quel point les liens sont tissés-serrés et les gens font partie d’une famille.

Une chose à ajouter ?

J’aimerais parler du volet financement. Les bailleurs de fonds voient le Théâtre Paradoxe comme du haut risque. Finalement, ce qui est difficile dans notre travail, c’est la charge fiscale parce que tous les prêts sont octroyés mais à des taux d’intérêts faramineux, donc cela limite les possibilités de développement, de grandir tant et aussi longtemps que cette dette-là est au-dessus de notre tête. Surtout quand on requalifie une église en théâtre. Et c’est cela que j’ai du mal à avaler. Car on est quand même une entreprise d’économie sociale. On est là pour aider les gens, former, mais dans un même temps, les bailleurs de fonds en profitent pour faire trop d’argent. Ce n’est pas juste.

Pour en savoir plus sur le Groupe Paradoxe : https://www.paradoxe.ca/

Pour en savoir plus sur le Théâtre Paradoxe : https://www.theatreparadoxe.co...

Crédit photos : Groupe Paradoxe